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HIPPOCRATE A LA MAISON

18 avril 2011

LA DURÉE DE VIE & LA TENTATION

 

Questions des plus intéressantes : est-ce que la durée de vie va continuer d’augmenter?

Si elle continue d’augmenter, il faudra choisir entre deux explications. Ou bien admettre que la médecine est vraiment de plus en plus performante. Ou bien reconnaître que l’amélioration générale des conditions de vie est telle que les individus peuvent faire désormais toutes les bêtises et que c’est finalement sans conséquences pour la survie.
Parce que, pour ce qui est d’avoir la tête aux bêtises, comme disait Audiard, le citoyen de base a la tête aux bêtises, quand il s’agit de choisir son style de vie.

transparent_frigo_tokyomangoUn  exemple : la bouffe.

La bouffe. On ne peut plus, en effet, parler d’alimentation… On ne s’alimente plus : on bouffe, on baffre, on se goinfre. Toute la société nous y pousse avec un bel élan. Un ami et disciple brésilien, récemment revenu pour quelques jours en France n’en revenait pas des publicités à la télévision. Il est vrai qu’en trois minutes, il avait vu défiler toutes les tentations possibles. Sucrées ou salées, lactées ou carnées, maritimes ou agrestes. (image:Réfrigérateur Japonais Transparent) Ce qui le faisait rire, c’est que chaque plage publicitaire incitait en principe… à la modération. C’est étonnant. Vous voyez deux copines pousser des petits cris de bonheur en dégustant leur yaourt léger – léger et on vous laisse entendre qu’un seul leur suffira. Que plus serait trop. Que la tentation d’un deuxième puis d’un troisième ne surgira donc pas.A croire que le diable a fait ses valises et s’en est allé ailleurs tenter les martiens.

A moins que le bandeau sagesse vous incitant à la modération juste en dessous de l’image tentatrice  ait un impact d’une exceptionnelle force. Ce dont je doute.

Réfléchissons un instant à la valeur pédagogique des dits bandeaux.  Pour cela je vais vous raconter une courte histoire.

Il fut un temps ou les spécialistes de la lutte anti dopage que j’avais l’honneur d’animer, se demandaient si, sur les produits potentiellement dopants il ne fallait pas faire inscrire « Interdit aux sportifs » Un éminent Professeur de Droit, le professeur Alaphilippe, fit alors remarquer que lorsque un faux monnayeur se mettait à la tâche, autrefois, il commençait par calligraphier avec le plus grand soin cet avertissement en principe terrorisant pour lui mais qu’il bafouait pourtant allègrement : « La Loi punit de vingt ans de travaux forcés le contrefacteur etc. »

J’en reviens à l’alimentation : Il y a tout de même quelque chose de terrible à voir la tentation et le pêché de gourmandise pareillement promus. Aves pareille hypocrisie dans le sous-titrage. Mais qui protestera. Qui saura lutter efficacement ? 

image_14452_grandeJ’ai une proposition très sérieuse à faire : pourquoi les fabricants de réfrigérateurs ne mettraient-ils pas sur le Marché des appareils qui n’ouvriraient ou plutôt ne seraient ouvrables qu’à l’heure des repas ? Ce serait un geste tout autant médical que civique.

C’est que le surpoids, ce n’est pas une petite affaire. D’abord, il n’est jamais isolé. Pour faire du lard, il faut dévier le métabolisme des sucres et graisses et le déséquilibrer. Et puis le surpoids, c’est une sacrée punition. Le surpoids, c’est une valise à promener.

 La vieille idée contre laquelle il faut réagir, c’est qu’il faut manger plus pour travailler plus. Pour pouvoir tenir le coup. C’est sans doute vrai pour les travailleurs de force… mais il y en a de moins en moins.

 Il faut en convenir manger est devenu une toxicomanie. Une addiction.

Comment se rééduquer pour y échapper ? 

Ce sera le sujet de notre prochaine rencontre.

Ce sera un début. Je vous propose en effet une série de conseils médicalisés pour conduite de vie quotidienne. On verra la bouffe la bagnole et la bronzette.

A la prochaine !

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13 avril 2011

J’ACCUSE LES MARCHANDS DE PEUR ET DE BOBARDS

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Occupons-nous un peu de problèmes pratiques touchant à l’exercice de la Médecine. A intervalles réguliers de longs gémissements se font entendre en haut lieu. Les Pouvoirs publics se lamentent en effet. Le motif de cette désolation : pas assez de généralistes. En particulier là ou la densité médicale est faible. D’après ce que l’on entend ce serait de la faute des mauvais docteurs. Ah ! Les vilaines gens. Ils n’en n’auraient que pour la ville, et ses promesses de gros sous. Et même les gros sous attireraient plus encore que la ville… Honte à eux.

Qu’il me soit permis de rectifier quelque peu. Dans bien des cas, c’est l’inverse qui est vrai. Je m’explique. Beaucoup de médecins, par goût, ou en raison de l’âge venu, souhaiteraient avoir une activité médicale modérée. Ils préféreraient travailler moins en gagnant moins. Et accepteraient volontiers de nouveaux confrères qui auraient les mêmes ambitions économiques limitées.

Eh bien, ce n’est pas possible. Pourquoi ? Tout simple. Si vous décidez de réduire la voilure et limiter vos activités, les charges, impôts, assurances et Caisses de retraite, les loyers et le matériel, etc. ne vous laissent tout simplement presque rien. C’est ainsi : pour gagner sa vie médicale, sauf à servir une clientèle milliardaire, il faut avoir une grosse activité. On ne peut pas faire tourner aimablement un Cabinet moyen et gagner sa vie.

Je ne vous raconte pas cela pour faire pleurer dans les chaumières, je vous explique simplement à quoi conduit désormais en routine cette absurde fascination pour le « toujours plus ».

Dans ces conditions, menacer les jeunes médecins de les forcer à s’installer dans les déserts médicaux a autant de chance de succès que de vouloir faire prospérer les villes à la Campagne.

Je voudrais dire aussi combien les retombées du Mediator conduisent à des inepties. Je pense avoir été un des premiers à insister sur le fait que le complexe médico-industriel considère les médecins comme leur courroie de transmission économique.  La médecine est un des plus beaux fleurons du monde de la consommation. Rien ne pourra être changé au soi-disant déficit de la Sécurité Sociale tant que ne sera pas discuté cet aspect génératif du dit déficit. Ce n’est pas une raison pour accabler l’Industrie Pharmaceutique de tous les pêchés, au prétexte que les médicaments ont des effets secondaires. Il faudrait d’ailleurs, à ce point de vue, que les médias réfléchissent un peu à cette importante affaire qui est la distinction de la causalité linéaire et de la causalité réticulaire. Chaque jour on nous apprend que telle cause précise détermine tel effet ciblé. Foutaise. X+Y-Z= maladie, faisait valoir avec justesse mon Maître Jean Bernard. Il aurait pu ajouter encore beaucoup de lettres à son équation.

Dans ma jeunesse on racontait cette histoire « Sous un bombardement, un fou tire la chasse des toilettes qui en ces temps avait son réservoir au dessus des têtes. Une bombe fait alors exploser la maison. Le fou rescapé sort des décombres et dit : je ne connais pas ma force ! »

La causalité linéaire expose à pareilles interprétations hâtives. J’ai écrit un jour qu’une pendule arrêtée donnait l’heure exacte deux fois par jour. Je persiste à trouver cette affirmation fort pédagogique.

 La morale de tout cela ? La voici, sous forme d’interrogation : quand va-t-on cesser de rendre la justice médiatique à coups de réductions trompeuses ? Si je voulais me venger, de ces réductionnistes aussi gonflés que creux, voici ce que je ferais : j’inviterais quelques uns  de ces accusateurs à manger du Bar et du Homard… mais je ne leur servirais que les arêtes du poisson et la carcasse vide du crustacé.

 Peut-être comprendraient-ils le mal qu’ils font en terrorisant le bon peuple à grands coups d’affirmations simplificatrices à l’excès.

Et pourquoi pas rêver : peut-être aussi les verrait-on publier, en guise d’autocritique, cette petite annonce autrefois popularisée par Pierre Dac : « Ai perdu hier soir… une belle occasion de me taire ».

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8 mars 2011

LES INEPTIES DES SOURIS ET LA CALVITIE

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Une mauvaise nouvelle m’avait anéanti : j’avais appris que selon une étude récente perdre ses cheveux tôt mettait en grand danger ultérieur de cancer de la prostate. Contemplant dans la glace mon crane sinistré, je gémissais contre les rigueurs de la fatalité biologique lorsqu’une lumière éblouissante survint sans crier gare. Des chercheurs américains de haut niveau avaient découvert par hasard que l’aluminium  faisait repousser le poil des souris déplumées. Si j’ose dire. La conclusion était que les messieurs transformés en monts chauves ou autres patinoires à mouches étaient prévenus qu’ils allaient bientôt se retrouver nantis de la crinière altière qui fait le prestige des lions superbes et généreux. Mais alors question subsidiaire : la repousse des cheveux allait-elle faire disparaitre le risque prostatique ?

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J’ai l’air d’en rire mais je ris jaune. Ce torrent d’inepties que l’on déverse au quotidien sur les rapports de la médecine et de la biologie est tout de même impressionnant. Et désolant. Le consternant, c’est cette tranquille assurance qui prend pour base qu’en chaque domaine on croit en la possibilité d’une explication simple annonciatrice d’un miracle possible. L’aluminium fait repousser les poils de la souris, donc il va guérir la calvitie… Tu parles !

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La pousse et la chute des poils en voilà un problème qu’il est compliqué. Expliquez-moi, me demanda un jour un bien portant, pourquoi je perds mes cheveux alors que j’ai du foin qui me pousse plein les oreilles. C’était joliment demandé. Mais je n’avais pas de réponse. Maintenant j’ai une crainte : et si l’aluminium laissait le crane dégarni et déclenchait un envahissement des oreilles par une végétation pilaire amazonienne ?

***

La nouvelle des rapports heureux de l’aluminium et de la calvitie n’a pas fait le buzz sur le net. C’est étrange. Une étude sérieuse a soutenu que le jour ou la calvitie serait vaincue la nouvelle ferait le tour du monde en moins de deux heures. Alors, je m’interroge : serait-ce que personne n’a cru à la nouvelle ? Je ne sais pas quelle est votre opinion…

Sources :
http://www.futura-sciences.com/fr/news/t/medecine/d/un-nouveau-remede-contre-la-calvitie_28178/
http://www.destinationsante.com/Calvitie-des-souris-au-poil.html

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16 février 2011

LES CERVELLES FOURRÉES A L’ILLUSION MÉDIATIQUE

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C’est souvent charmant la naïveté, mais si elle prend des allures dominatrices, alors là, ce n’est pas pareil : je me fâche. Michel Onfray est allé sans doute un peu loin dans sa condamnation totale de Freud mais il a tout de même pointé quelques conséquences regrettables du culte Freudien. Par exemple cette nouvelle claironnée avec soulagement après toute catastrophe locale ou générale : « Une cellule psychologique de crise a été mise en place » Comme si les résultats allaient d’eux-mêmes. Jamais entendu parler des résultats, moi. Et vous ?

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Autre chose : le traitement des délinquants sexuels. Le traitement ? Quel traitement ? Vous croyez, vous que l’on prend une petite pilule comme ça et le violeur devient un tendre soupirant ? Vous ne pensez pas que l’on se paie un peu votre tête ?

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Dernière de la journée : ce matin sur une chaîne de télévision : un bon pépère gros et gras, un saint homme de bon vivant donnait une leçon… d’amaigrissement ! La foi qui n’agit point, est-ce une foi sincère ? Demandait avec un brin d’anxiété une héroïne du théâtre classique…

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Admettons qu’il était sincère : qui aura le courage de reconnaître que changer un comportement, même de détail, c’est ce qu’il y a de plus difficile au monde. Une créature prestigieuse autrefois portée par notre planète, c’est d’Albert Einstein que je veux parler, a dit un jour : « Bien plus fort que les quatre grandes forces physiques qui sont derrière les aventures de la matière et de l’énergie, il y a la force… de l’habitude ! Et il s’y connaissait en forces le cher Albert !

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Tout cela devient préoccupant. Comme des cochons à l’engrais, nous avalons toutes les saletés que l’on nous fait ingurgiter. La question subsidiaire est : pour le compte de qui faisons-nous du lard ? Et quand donc déciderons-nous de nous sortir de cet état de sous-information désinformation dans lequel nous semblons nous complaire ?

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7 février 2011

LES CAGOULARDS DE L’ACNÉ

ACNE

Les effets de manche, c’est très joli mais il ne faudrait pas que ça aille trop loin. Un ténor du Barreau fulminait il y a quelques jours contre le Ro/accutane. Il affirmait que le médicament avait été interdit (sic) mais était ensuite réapparu sous d’autre noms. Alors le Maître se lança : « Un assassin sous une cagoule, c’est toujours un assassin ».

Evidemment c’est faux de bout en bout. Le Ro/accutane n’a jamais été interdit. Plus simplement, comme il avait atteint l’âge respectable ou des génériques moins chers ont le droit de se substituer à lui, il a disparu à leur profit. Les génériques réputés « encagoulés » se sont alors multiplié. En bénéficiant d’un encadrement comme on en voit rarement. La prescription chez une femme en âge de procréer oblige à un suivi pointilleux et contraignant. Ce n’est pas tout : avant de prescrire on remet une documentation, on discute évidemment avec la famille pour un mineur et souvent ce n’est pas simple. S’il y a un problème psy antérieur on freine des quatre fers.

Mais mon très cher Maître voici de quoi vous permettre de cultiver la démagogie dans l’autre sens : ne serait-il pas de la part d’un médecin un véritable abus de pouvoir condamnable que de refuser à un adolescent complexé, malheureux parce que ses copains et copines se foutent de lui, le médicament qui va lui redonner un contact social rénové ? Or que faites-vous à agiter votre étendard : vous préparez d’autres malheurs. Vous allez transformer un problème en un autre.

Voulez-vous que je vous dise mon cher Maître/ Les effets secondaires des médicaments, c’est comme les retombées fâcheuses d’une plaidoirie que l’on voulait bonne et qui énerve le Jury.

Alors cessez de fulminer. Méditez Nietzsche et l’innocence du hasard et n’occultes pas le bénéfique sous le danger, fut-il réel.

Parce que j’ai vu deux progrès étonnant pendant ma vie médicale : la tri-thérapie dans le SIDA qui a fait passer mon service de l’état de mouroir à celui de centre de soins et le Ro/accutane qui a redonné la joie de vivre à des dizaines et centaines de gens, jeunes ou moins jeunes.

Mon Cher Maître, vous avez droit au Bonnet d’âne des désinformateurs à but lucratif. Cela posé vous avez des circonstances atténuantes : vous ne connaissez manifestement rien à la médecine.

Nous ne demandons qu’à vous apprendre les dessous de la cagoule. Vous pourriez former un groupe avec les journalistes qui ont relayé sans sourciller vos propos…

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26 janvier 2011

ANATOMO-CLINIQUE

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La seule fois de ma vie où l’on m’a confié le soin d’enseigner certains membres de l’ENA je me suis autorisé cette question : « Vous avez entendu parler de la Médecine Chinoise, de l’Homéopathie, de l’Ostéopathie… quelle est la dénomination exacte de la médecine officielle que l’on enseigne dans les Facultés et que l’on met en pratique dans les hôpitaux. Ces Facultés et ces Hôpitaux que, bientôt, vous, cadres de la Nation aurez à gérer ? »
Je n’obtins aucune réponse. Je dis alors que cette médecine avait pour nom « la médecine anatomo-clinique » Les mimiques furent révélatrices. Non seulement ces jeunes gens n’avaient pas su répondre mais encore la réponse ne leur disait strictement rien. C’était embêtant. Parce que si l’on ne comprend pas le sens de cette expression, on ne peut rien comprendre à ce qu’est la pratique clinique.

Car la question qui se pose est bien celle-ci : le médecin clinicien, examinant la malade allongé, quel schéma d’investigation a-t-il en tête ? Très précisément que fait le clinicien examinant un malade ? réponse : il fait de la clinique pour imaginer de l’extérieur ce qui se passe à l’intérieur du corps. Par la pratique clinique, il cherche à savoir quelle partie de l’anatomie est touchée. Il fait de la médecine anatomo-clinique.

Cette médecine anatomo-clinique n’est pas vieille. Elle a juste un peu plus de deux siècles. Pour bien prendre conscience de cela, partons d’un livre justement célèbre. Celui écrit par Michel Foucault : « Naissance de la Clinique » Le titre est malheureux. Foucault aurait dû choisir pour titre de son livre « Naissance de la médecine anatomo-clinique » Car la Clinique, c’est Hippocrate qui l’a mise sur les rails. Et cette clinique pendant plus de deux mille ans a conduit le médecin clinicien à faire ses diagnostics en étudiant les humeurs. Ce que raconte et explique si bien Foucault, c’est au contraire l’abandon de la théorie des humeurs.

Il y a deux grands noms à l’origine de cette révolution : Bichat et Laennec. Deux jeunes hommes étonnants. De manière très caricaturale on peut dire ceci : l’un, Bichat, s’est donné pour but de repérer au cours d’autopsies, à l’intérieur des corps les lésions solides qui avaient tué le malade, l’autre Laennec a commencé de montrer comment du vivant du malade on pouvait provoquer des signes qui indiquaient qu’une des lésions signalées par Bichat et les siens était responsable de la maladie.

Pour bien comprendre cela, il faudra passer à l’explication de trois autres mots : Symptômes, signes et séméiologie.

Petite précision. Lorsque j’avais à enseigner de très jeunes étudiants, je posais souvent comme première question : « A quel âge est mort Bichat ? » La fourchette des réponses allait de cinquante à soixante quinze. Alors, sadique et triomphant j’assenai : « Bichat est mort à 31 ans. Si vous voulez faire aussi bien que lui en aussi peu de temps vous avez tout intérêt à suivre ce cours avec attention »

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24 janvier 2011

PETITE CONTRIBUTION A UNE MÉDECINE PARTAGÉE

300px_Marie_Fran_ois_Xavier_BichatVoici une petite histoire vraie. Le Théâtre est un endroit rêvé pour distiller de la pédagogie médicale. Ces dernières années, je suis donc monté sur les planches. Je recommencerai parce qu’il y a là une mine. Vous me direz que Molière a déjà fait ça tellement bien que c’est un peu ridicule de vouloir se lancer sur ses traces. C’est vrai. Mais on peut faire de la montagne sans prétendre atteindre le sommet de l’Everest.

J’en viens à mon sujet du jour. J’avais écrit un texte intitulé « Mon Knock » Je racontais comment les médecins parfois choisissent de régner par la peur. Diafoirus, Knock : même combat. Et combien d’autres aujourd’hui…

A ces fouteurs de panique organisés, j’opposais la jeunesse triomphante de quelques jeunes révolutionnaires médicaux soucieux, eux, du bien public. Bichat (portrait ci-joint, de Xavier Bichat) et Laennec, en particulier.

Bichat ! Je commençais souvent mes cours en demandant aux étudiants : « A quel âge est mort Bichat ? » Les réponses variaient généralement de 45 à 75 ans. Je rectifiais sadiquement : il est mort à 31 ans. Si vous voulez faire aussi bien que lui vous avez tout intérêt à suivre ce cours avec la plus grande attention.

Au fait quel est le grand apport de Bichat ? Simple. Alors que depuis des siècles on pensait que la maladie venait du mauvais mélange des liquides au sein du corps, Bichat s’est battu pour faire admettre que la base la meilleure pour distinguer les maladies les unes des autres c’était au contraire d’étudier les dommages repérables affectant les tissus constituant les organes. Bref, Bichat demandait que la « lésion » d’un organe soit tenue pour l’origine de la maladie. Ce qui posait quelques problèmes car les humeurs sortent pour partie du corps et sont accessibles à l’observation mais la lésion demeure cachée. Il fallait donc imaginer une nouvelle façon de faire de la médecine qui permettrait d’imaginer la lésion cachée.

Pourquoi raconter cette histoire ? Voici. Je répétais mon texte, un peu avant la « Première » et une dame connaissant bien le théâtre me servait de guide. J’étais lancé. Elle m’interrompt : « Qu’est-ce que ça veut dire lésion ? » J’ai été interloqué. Mais elle avait raison : c’est un mot très mystérieux : lésion. Je le mettrai très vite au « Dictionnaire »

Conclusion : ce serait épatant si vous pouviez, vous aussi, me demander de vous expliciter ce que vous n’avez jamais compris de la médecine et que vous n’osez pas demander. Peut-être est-ce que ça vous rendrait service pour vos études pour votre activité professionnelle. Mais, pour ce qui concerne ma propre activité, ce serait une véritable occasion de rendre ma pratique plus humaine en comprenant mieux ce qu’il y a dans mon jargon qui me semble clair comme de l’eau de roche et qui paraît au contraire épais et ténébreux aux non initiés.

Avec ce que nous découvririons en commun, nous pourrions faire un petit paquet que l’on enverrait à tous les étudiants en médecine…

Ce n’est pas du tout utopique. Ce serait de la médecine partagée.

On commence ?

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http://fr.wikipedia.org/wiki/Marie_Fran%C3%A7ois_Xavier_Bichat

21 janvier 2011

ANATOMIE

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Vous voyez passer un beau mec ou une belle fille : vous sifflez et dites à votre voisin : belle anatomie. L’anatomie, c’est l’aspect extérieur du corps, dans ce cas. Même chose lorsque le Commissaire –priseur d’une vente aux enchères annonce : « Nous vendons cette anatomie d’homme ». Généralement, c’est d’un dessin de Monsieur tout nu, vu côté pile ou côté face, qu’il s’agit.

Pour le médecin et le chirurgien, l’anatomie, ce n’est pas ça du tout. Pour lui l’anatomie, c’est au contraire, comment s’organisent sous la peau les os le muscles les tripes et les poumons le foie et les reins, les nerfs et les vaisseaux sanguins etc.

Apprendre cette anatomie jusque dans les plus petits détails, cela a été pendant longtemps la base même des études médicales. On apprenait aux étudiants en quel point, précisément, les muscles se fixaient sur les os. Quelquefois sur un tout petit bout de l’humérus ou du fémur s’attachaient ensemble plus de dix muscles. Il fallait apprendre par cœur aussi comment se croisaient ou se côtoyaient tous les tuyaux ou nerfs du corps.

Bref, il fallait savoir sur le bout des doigts ce que montre un écorché. Vous en avez vu des « écorchés » : ce sont ces mannequins en plastique démontables. Vous pouvez jouer à chercher le foie le cœur le pancréas l’estomac les poumons…

Si vous aviez vécu, il y a trois cents ans, vous n’auriez jamais vu d’écorché. Pour plusieurs raisons. D’abord, il était interdit de toucher aux cadavres et ceux qui voulaient étudier l’anatomie devaient le faire sur des animaux. Ensuite et surtout, l’anatomie n’intéressait que peu les médecins. Pourquoi ? Très simple. Parce que l’on pensait que les maladies ne venaient pas des composants solides du corps mais des liquides qui les baignaient. On ne parlait pas de liquides mais d’humeurs. On imaginait qu’il y avait quatre humeurs qui circulaient dans le corps le sang, la lymphe, la bile jaune et la bile noire. On pensait que sous l’influence de l’environnement, chaud ou froid sec ou humide, les humeurs, au lieu de se mélanger harmonieusement, faisaient comme une mayonnaise ratée : le mélange tournait. Il « tournait » d’autant plus facilement que tel ou tel gros organe était affaibli.

On pensait donc que pour savoir d’ou venait une maladie, pour poser un diagnostic valable, il fallait considérer les humeurs qui sortaient du corps : la sueur… et tout le reste.

C’est de cela que s’est moqué Molière.

Mais un jour, tout changea. On pensa que pour comprendre d’où venait la maladie, il fallait regarder à l’intérieur du corps pour chercher une anomalie des tissus solides constituant les organes et non pas se contenter d’étudier du dehors les aventures des humeurs. Une révolution était en marche. La révolution anatomo-clinique.

19 janvier 2011

CLINIQUE

stethoscope

Le mot clinique vient du grec. Clinos veut dire allongé. A partir de cette racine a été forgé un mot qui a deux sens complètement différents.

La clinique, où l’on vous a débarrassé de votre appendice malade, c’est donc le lieu médical ou l’on garde des malades allongés. Peut être avez-vous été opéré dans une « policlinique. Notez bien ceci : j’ai écrit « poli » avec un i et non pas un y. Là encore poli vient du grec polis qui signifie la ville, la cité. La policlinique c’est donc la clinique de la cité.

Parfois on voit écrit « polyclinique » avec un y. Le sens est tout diffèrent. Avec un y poly veut dire « plusieurs » Une polyclinique c’est donc un lieu où l’on fait un peu de tout du point de vue chirurgical ou médical.

Voilà déjà un acquis. Mais ce n’est pas le plus important de ce que vous devez savoir.

Voici ce que vous devez savoir : le mot clinique a un deuxième sens. Celui-la vraiment médical.

Lorsque les médecins entre eux parlent de « la clinique », d’un « examen clinique », du « sens clinique », de « signes cliniques » lorsqu’un patron d’un Hôpital universitaire titulaire d’une « Chaire de clinique » attribue à un de ses élèves un poste de « chef de clinique » le mot clinique ne fait pas du tout référence à un quelconque bâtiment.

La clinique, dans ce cas, c’est l’art et la manière d’examiner le malade couché pour obtenir un diagnostic. De l’examiner sans s’aider d’aucune prise de sang ou radio ou scanner ou échographie. Le médecin a son savoir et son savoir faire. Le malade a son corps et son mal. La clinique c’est ce qui guide la pratique médicale à mains nues et permet au médecin de reconnaître de quel mal caché souffre son malade.

L’examen Clinique, consiste donc à examiner un malade couché pour recueillir les symptômes et de provoquer les signes qui permettent de faire le diagnostic sans l’aide de quoi que ce soit sinon un stéthoscope et un marteau à réflexe.

D’autres expressions très couramment employées entre médecins font aussi appel au mot clinique.

Le « sens clinique », c’est le flair médical, c’est la base de l’art médical. Le médecin a appris au cours de ses études à reconnaître quels symptômes et signes caractérisent chaque maladie. Le clinicien doué de sens clinique c’est celui qui flaire vite le bon diagnostic.

Pour que les étudiants en médecine puissent acquérir ce « sens clinique », pour qu’ils deviennent de bons, de fins cliniciens, l’Université à confié à d’éminents professeurs le titre envié de « Professeur de Clinique » Ils sont titulaires d’une « Chaire de Clinique ». Les enseignants plus jeunes et qui sont chargés pendant quelques années d’enseigner les étudiants sont les « Chefs de Clinique ».

Mais vous-même ? Vous êtes clinicien aussi. Comme Monsieur Jourdain faisait de la prose sans le savoir, vous faites de la clinique sans le savoir. Quand vous dites « X marche drôlement je me demande s’il n’a pas eu une petite attaque … » ou » Toi, tu n’es pas bien tu as les mains chaudes, tu dois avoir de la fièvre et j’entends comme tu tousses, tu dois avoir une bonne bronchite » vous faites de la clinique.

En passant, notez bien : le mot clinique a évolué . On peut faire de la clinique exercer son sens clinique sur quelqu’un qui est debout et non pas couché.

Peu importe. L’essentiel c’est que vous reteniez ceci : il y a la Clinique bâtiment et la Clinique art médical.

Retenez bien pour ne pas oublier : le Chef de Clinique n’est pas le Patron d’une clinique, c’est un enseignant qui enseigne aux étudiants en médecine qui débutent l’art de faire des diagnostics sans se servir d’autre chose que de son savoir, de ses mains, de ses oreilles, de ses yeux et de sa parole… et aussi et surtout du corps du malade.

15 janvier 2011

L'ADN D'UN CAPITAINE

adn« Thierry Dusautoir L’ADN d’un capitaine » Ainsi le journal l’Equipe.fr annonçait-il récemment en première page un article concernant le valeureux meneur du XV de France ! C’était beau et ça sonnait bien. Comme un coup de trompette annonçant l’entrée dans l’arène d’un grand gladiateur. Il est vrai que Dusautoir est un valeureux Capitaine. Un garçon intelligent et travailleur, habile balle en mains, habile à manier les mots. Bref : un vrai Capitaine !

La question posée devient alors : cet ensemble de qualités physiques autant que moral, tout cela serait dû à son ADN ? Ben… sans doute pas ! Alors pourquoi ce titre ? L’Equipe en faisant claquer son bandeau se conforme à la manière de parler du moment. Quand on évoque « l’ADN » d’un individu aujourd’hui, on fait allusion à ce que le dit individu est censé receler de plus personnel, de plus intime, de plus aimable ou de plus détestable. On touche à ce que ce vieux Nietzsche appelait la « volonté de puissance » Et on pense alors que ce que l’on affirme s’enracine dans ce que la science à trouvé de plus beau…

Eh bien, non ! Soutenir que l’ADN d’un individu déciderait s’il sera grand capitaine, ou ne le sera pas, c’est du point de vue biologique une affirmation plus que hardie. Très clairement, même c’est proférer avec autorité une ineptie biologique.

Le Docteur Lucien Mias très ancienne autre gloire du rugby français aimait lui aussi user de métaphores biologiques pour faire comprendre ce qui donnait quelque chose de plus à ses joueurs. Un bon pack, disait-il, c’est une « contagion » et pour un joueur au dessus du lot, il parlait de « Qualité hormonale » Le Docteur Mias faisait dans l’image qui frappe, pas dans le scientifique. Pour l’ADN du Capitaine, c’est pareil. On est dans l’image. Oui mais… aujourd’hui on aime croire qu’on est scientifique quand on manie les images.

Vous me direz avec beaucoup de justesse que de cela tout le monde se moque totalement et que je viens jouer là les redresseurs de torts prétentieux alors qu’on ne m’a rien demandé. Ce n’est pas faux… sauf… sauf que, si un jour professionnellement, vous rencontrez un expert et que le problème tourne autour de l’hérédité (ce qui dans le champ médical environnemental et social n’est de nos jours pas une petite chose) si vous partez sur ces bases là concernant l’ADN vous ne pourrez pas avec lui aborder le problème au fond. Vous me direz « je m’en fiche, je ne discute jamais avec de tels experts ».

Bon, alors je change de question : cette fois je vous demande : que pensez-vous de José Bové lorsqu’il part en guerre contre les OGM ? C’est clair, si vous voulez répondre à cette question autrement qu’affectivement, il faut que vous sachiez vraiment ce que c’est et ce que fait l’ADN. Vraiment on ne peut pas parler sérieusement d’OGM ni de BIO sans savoir ce que c’est que l’ADN… José Bové sait très bien ça, lui !

La question que l’on n’ose pas poser la voici donc : c’est quoi exactement l’ADN ? Pour expliquer cela il faudra plusieurs heures de débat interactif, le blog ne suffira pas. Croyez-vous que cela soit au dessus des possibilités d’un non professionnel de la biologie ? Je vous assure bien que non. Pour ces bonnes raisons, je souhaite savoir si cela vous intéresse que nous consacrions le temps nécessaire à approfondir tout cela.

« Je cherche à comprendre » : c’est ce qu’a dit en mourant le Prix Nobel Jacques Monod… qui avait d’ailleurs gagné son Nobel en étudiant le fonctionnement de l’ADN. Nous, nous chercherons à comprendre ce qu’il voulait comprendre… si le sujet vous intéresse et si vous demandez que nous organisions un séminaire, un atelier interactif....

 

 

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